Le gros

Le gros, c'est mon coloc.

Oui, je sais, c'est pas très gentil d'appeler son coloc "le gros", s'pas gentil de s'attaquer à l'apparence des gens, toussa, toussa... Enfin pour une fois, vous m'excuserez, mais je m'en tamponne le coquillart de ce que les gens pensent. Le gros, je l'appelle comme ça à cause d'un processus très long et douloureux d'internalisation de frustrations et de colères concernant sa - grosse - personne.

Bref!

Le gros, c'est mon coloc.

Avant de vraiment commencer cet article, je tiens à souligner que tout ce que je vais écrire est vrai, qu'il ne s'agit en aucun cas d'un sketch, mais bien de la - triste - réalité.

Je tiens aussi à dire que j'ai hésité un moment avant d'écrire un article sur lui. Tout d'abord parce que je ne voulais pas lui accorder de l'importance - car voyez-vous, je m'efforce chaque jour d'oublier sa présence -, et aussi parce que je souhaitais vous priver d'une satisfaction que je considère un peu malsaine : celle de vous marrer de mes propres "galères". Mais bon, maintenant je suis grande, je fais la part des choses, et je me dis que moi aussi, je me marrerai si j'avais une pote avec autant de bol que moi. Donc curiosité malsaine ou pas, j'ai décidé de cracher le venin, et de reporter toutes mes frustrations sur ce blog. Après tout, ça sert aussi à ça, un blog.

Donc premièrement, un point sur comment que je fonctionne, moi, dans la vie de tous les jours. Ca va vous aider à comprendre pourquoi que je suis énervée chez moi.

Je n'aime pas regarder la TV, et je n'aime pas non plus des masses quand on la regarde. Quand je suis chez des potes et que quelqu'un lâche nan mais la TV c'est pour avoir un fond sonore, je suis capable de faire la gueule juste pour ça. Je préfère un million de fois de la musique de merde plutôt qu'une télé-réalité ou un soap opéra à la con - oui, parce que c'est ce que tout le monde regarde dans ce genre de soirées, et moi, ça me fait abyssalement chier - - et oui je crache dans le pain qui m'a nourri, rien n'a fout'. Bref, je n'aime pas quand quelqu'un regarde la TV, en particulier si c'est juste pour éviter le silence. 

Autre chose, j'ai des problèmes aux oreilles, plus précisément j'ai les trompes d'Eustache qui merdouillent sévère, ce qui fait que mon spectre de décibels est plus restreint que le vôtre, et que j'entends aussi des sons que vous filtrez inconsciemment. Donc même si mes oreilles sont bouchées, il y a des moments où mon cerveau se focalise sur certains bruits et où ces bruits prennent toute la place et je finis par m'énerver toute seule avec un mal de crâne de la taille du Texas. Exemples : les bruits de ventilations, les tic-tac d'une horloge, l'eau qui goûte dans un évier, les cliquetis d'un vieux radiateur, les bruits de frigo, la pluie sur une vitre ou un toit, le sifflement du vent et les ronflements d'un mec qui ne sont JAMAIS réguliers - ça me rend folle -... et puis tu rajoutes les acouphènes, mais c'est autre chose.

Aussi, je suis loin d'être maniaque, mais j'aime quand même quand c'est tout est rangé et propre. La base, quoi.

Voilà, donc ça, c'est pour moi.

Passons au gros, maintenant.

Le gros, il a la trentaine, il est gros, il est software engineer pour une compagnie qui fait des applications sur Android, il est ultra geek, il est célibataire, et il n'est pas méchant... il a juste tous les autres défauts du monde. Et vous allez voir que tout ce que je vous ai dit sur moi va vous aider à comprendre mon point de vue sur ses dits défauts.

Le gros, qu'il soit gros je m'en fiche. Son apparence physique je m'en fous, à partir du moment où il ne me la renvoi pas dans la figure. Donc forcément, quand il est en caleçon sur le canap' ou même en onesie ouvert en mode torse-poils, moi, ça me donne de l'urticaire. Je pense que le gros serait choqué si je paradais en soutif-culotte dans l'appart - ce ne serait que justice cela dit.

Ces trois photos sont littéralement les seules fois où j'ai daigné mettre les pieds dans le salon quand il était là. Il a toujours la même place, toujours le même regard rivé vers la TV, toujours son ordi avec lui, toujours en onesie. 

Voilà donc au jour d'aujourd'hui tout le temps que je passe dans l'appartement, je suis dans ma chambre. Et je ne vais pas dans le salon pour plusieurs raisons :

1) Il y est tout le temps. 

Il y est même tellement souvent, que j'ai quelques fois l'impression qu'il fait parti de la pièce. Aussi, ses ordinateurs portables sont tout le temps dans le salon. Il en a un branché sur la TV pour se connecter à Netflix. Et il en a un autre sur lequel il joue aux jeux vidéos, en même temps qu'il regarde la TV. 

2) La TV est TOUT LE TEMPS allumée.

Ca me désespère, qu'il soit aussi passif et in-intéressé par le monde qui l'entoure au point de rester cloîtrer chez lui nuit et jour - sauf quand il bosse, bien sûr - le cul posé sur son canap à regarder la TV!

Il faut savoir qu'il a eu une période d'un mois environ où il regardait exclusivement des films d'horreur. Il est ensuite passé à sa période Star Wars, et maintenant il joue aux jeux vidéos. Mario Bros, précisément. Ce qui me rend folle car lorsqu'il ne joue pas, il laisse la TV en mode Wii, et le jingle de Mario Bros tourne en boucle... AAaargghjkdglksjdbglkjb...

3) La table basse sert de décharge.

Ceci est un "petit" bordel, jour 2, ça s'est accumulé par la suite.

Le gros est crade, c'est un de ses plus grands défauts. Il ne nettoie pas après lui, il laisse tout s'empiler jusqu'à ce qu'il ne voit plus le verre de la table. Ou bien jusqu'à ce que je ramène des potes et qu'enfin il réalise dans sa petite tête que ça la fout mal de laisser tout ça traîner... Qu'il ne m'étende pas la même courtoisie au quotidien me surprendra toujours... De toute façon, quand tu vois la gueule de sa chambre, c'est pas étonnant!

4) Le gros souffre d'un manque cruel de savoir-vivre.

Il faut savoir qu'en général, je le préviens par texto si des gens viennent - ce qui n'arrive pas souvent vu que je bosse tous les soirs. Du coup, quand des potes sont là, on pourrait penser qu'il nous laisserait la place pour discuter, manger, regarder un film... - surtout que je le rappelle, je ne suis JAMAIS dans la salon, donc je ne le dérange jamais...

Mais non, il reste là, et pire, si on parle trop fort, il augmente le son de la TV. Si, si, j'vous jure! Et quand il n'est pas irrespectueux comme ça, il est irrespectueux en ne bougeant pas de place du canapé pour ne pas qu'un pote soit à l'écart.

Donc clairement, puisque je ne me sens pas la bienvenue dans le salon, je n'y mets pas les pieds!

J'ai peu à peu abandonné l'idée de faire la conversation et d'apprendre à le connaître un peu. Ce que je connais de lui me suffit, et honnêtement, ne me donne pas envie d'en connaître d'avantage.
Pourtant, discuter j'ai essayé, et même mes potes ont essayé. Il n'est pas très causant, il n'a que 3 sujets de conversations : la TV/jeux vidéos, l'informatique, et l'online dating.
Parce que Môssieur, dans toute sa grosseur, il utilise l'Internet pour avoir des rendez-vous romantiques. Bon c'est assez commun, vous me direz... mais pas avec lui, oulala non! Une fois - true story, bro - il a fait un rencard en onesie! Oui madame, il est allé boire une bière dans un bar sur Davie st. en onesie Star Wars. J'en ris encore...
Quand on en parle, il nous dit que de toute manière il y a 10% de filles qu'il rencontre qui lui file un deuxième rendez-vous, qu'il ne sait pas pourquoi ça ne marche pas mais que quand même, il essaye de faire attention à ce qu'il mange... Alors je ne juge pas hein, m'enfin il me semble que quand on se fait livrer une ENORME boîte par Pizza Hut toutes les semaines, on est loin de faire attention à soi.

J'ai donc appris que le gros était bourré de contradictions.
Autre contradiction : le gros n'aime pas quand je mets le chauffage dans l'appart' car ça coûte cher. Pourtant le gros laisse tout le temps les lumières allumées. Ce qui m'amène à vous parler d'une particularité particulièrement particulière chez le gros : il est fourni avec un mode Paranormal Activity. J'explique : quand tu rentres chez toi et que toutes les lumières sont allumées - même celles des chiottes, soyons clairs -, et que quand tu vas dans la cuisine tous les placards sont ouverts, tu t'attends à ce qu'un truc pas clair te saute dessus. Aussi, des fois tu entends le gros parler dans son sommeil, ou carrément sleepwalker en cale-bute pour aller bouloter un truc dans la cuisine.

Voilà, donc tout ça m'énerve, mais en général je ne dis rien. J'ai juste quelques élans de frustrations, qui donnent des trucs comme ça - avec des fautes d'anglais, vous m'excuserez : 

Je rigole aujourd'hui à ce texto parce que j'ai voulu écrire "because I sure won't be cleaning it" et j'ai apparemment zappé de d'écrire la fin de la phrase sous le coup de l'énervement... et ça ridiculise un peu tout le truc ah ah

Mais même après sa réponse, je ne savais pas quoi écrire. Que répondre à quelqu'un qui te dit qu'il est dépressif quand en réalité il est trop fainéant ?!
Donc après ça, le néant. Je n'ai rien répondu parce que j'avais juste envie d'écrire "But the thing is : you're always depressed like that!" et je ne suis pas assez méchante pour envoyer ça - mais pour le penser, oui, ah ah.

Restent les autres frustrations :
- après maintes demandes, je n'ai toujours pas le double de la clef de la boîte aux lettres,
- il sait que je bosse jusque tard, il sait que je suis fatiguée après le boulot, MAIS il attend quand même 1h30 pour prendre sa douche et foutre la ventilation pendant tout ce temps and beyond - j'ai dit que je haïssais ce genre de bruits ou pas ?
- pour le boxing day, il s'est acheté - en plus d'une wii - un système de son pour la TV... ce qui fait que quand je rentre le soir et qu'il est encore devant la TV, le son est très, TRES fort. Et moi qui viens de me taper 7h de taff dans un bar bruyant, j'ai juste envie d'être au calme - et en même temps, il est 2h du mat' quoi, va te coucher, gros!

...

Enfin bref, c'est épuisant tout ça!
Je vous jure que des fois, je me trouve à court d'adjectifs quand j'essaye de décrire mon coloc ; j'en viens à penser que c'est une tâche impossible, et qu'au final, il suffit de le voir dans son habitat naturel pour y croire.